lundi 17 janvier 2011

Félicia ou mes fredaines par Andréa de Nerciat. Très rare édition datée de 1775 avec figures libres. Un des rares curiosa de la fin du XVIIIe siècle.



André-Robert ANDRÉA DE NERCIAT

FÉLICIA OU MES FREDAINES. La faute est aux Dieux qui me firent si folle.

A Londres, s.n., 1775 [i.e. 1785 ? 1795 ?].

4 parties en 2 volumes in-16 (13,5 x 9 cm) de (4)-230 et (4)-225 pages.

Reliure demi-veau caramel, dos à nerfs, filets à froid, pièce de titre de maroquin rouge, plats de papier marbré, doublures et gardes de papier peigne (reliure de la fin du XIXe siècle). Plats et coins légèrement frottés, très petit manque à l'extrémité de la coiffe supérieure du premier volume. Infimes frottements. Intérieur en bon état, collationné complet. Quelques rousseurs dans la quatrième partie. Quelques taches et mouillures sans gravité. 10 eaux-fortes au total pour les deux volumes dont 7 libres.


TRÈS RARE ÉDITION A LA DATE DE 1775.


Ce roman libertin d'Andréa de Nerciat a été réimprimé de nombreuses fois au cours des dernières années du XVIIIe et des premières années du XIXe siècle, et ce, malgré une condamnation à la destruction. Dutel, dans sa bibliographie des ouvrages érotiques publiés clandestinement en français entre 1650 et 1880, n'en compte pas moins de 17 impressions entre 1775 et 1869. Dutel indique que ce roman aurait été publié vers 1775, et donne pour première édition, l'édition sans figures d'Amsterdam, sans date, en 221 et 256 pages, sans doute à cause des erreurs de pagination relevées. Notre édition est décrite par Dutel sous le n°A-391. Elle aurait été publiée vers 1785 en réalité, est imprimée sur Vergé. L'exemplaire Dutel contenait 24 gravures retournées de Borel-Elluin. Chaque partie possède sa propre page de faux-titre et page de titre. Pascal Pia dans les livres de l'Enfer n'est pas aussi catégorique sur la première édition de ce roman. Il indique que la destruction de cet ouvrage a été ordonnée plusieurs fois, notamment par un arrêt de la cour royale de Paris en date du 21 décembre 1822, toujours sans doute à cause des illustrations libres qu'il contient assez souvent. (Pia, Les livres de l'Enfer, col.486 et suiv., éd. 1998). Notre exemplaire, contrairement à ce qu'avance Dutel, ne nous semble pas imprimé vers 1785 mais plutôt à l'extrême fin du XVIIIe siècle ou au début du XIXe siècle, probablement entre 1795 et 1800. Typographie, mise en page et caractéristiques du papier nous le laissent croire en tous cas. Quoi qu'il en soit, cette édition datée 1775 ne se trouve pratiquement nulle part, nous n'avons pu en répertorier aucun exemplaire dans les dépôts publics référencés au catalogue collectif des bibliothèques de France. Ce roman libertin concentre l'essence du romanesque libertin en un dosage subtil d'humour, d'évasion et d'élan passionnel. Le tour de force de l'auteur est de se livrer à une parodie jubilatoire tout en écrivant un vrai roman d'aventure, avec ses mystères, ses épisodes palpitants, ses improbables coïncidences et hasards merveilleux... Avec Margot, Thérèse ou Juliette, Félicia est à coup sûr l'une des plus grandes courtisanes de la littérature du XVIIIe siècle.


"Déjà les mains avaient beaucoup trotté, déjà les bouches et les tétons avaient essuyé mains hoquets amoureux, quand on se leva de table. On y laissa les deux Italiens, qui ne voulurent point la quitter. Le peu de signes de vie qu’ils donnaient encore n’était que pour demander à boire et pour jurer qu’ils ne bougeraient point de là tant qu’il y aurait une goutte de vin dans la maison. La signora Camilla garda son ivrogne de père et fit demeurer un valet pour le secourir en cas d’accident. Tout le reste de la compagnie, à l’exception du chevalier qui venait de disparaître, passa de la salle à manger au salon, dont les deux battants demeurèrent ouverts… O pudeur ! que tu es faible quand Vénus et Bacchus se livrent à la fois la guerre ! Mais est-il absolument impossible que tu leur résistes ? Ou n’es-tu pas plutôt charmée de ce que la puissance connue de leurs forces justifie ton heureuse défaite ? J’y pense encore avec étonnement. À peine eûmes-nous mis le pied dans le salon que l’un de nos officiers, défié par les regards lascifs de Sylvina et perdant toute retenue, l’entraîna vers l’ottomane et se mit à fourrager ses appas les plus secrets. Elle ne fit qu’en rire. Bientôt, l’agresseur enhardi par l’heureux succès de son début, s’oublia jusqu’à manquer tout à fait de respect à l’assemblée. Sa partenaire, égarée, transportée, partageait ses plaisirs avec beaucoup de recueillement. Déjà l’Italienne mariée suivait son exemple à deux pas de là, dans les bras de l’autre officier, non moins effronté que son camarade. Argentine courait se cacher dans les rideaux des fenêtres pour ne pas voir ces groupes obscènes ; monseigneur l’y suivait pas décence et par tempérament. Tout le monde, occupé de la sorte, oubliait mon nouvel amant et moi, qui demeurions médusés au milieu du salon… Un regard expressif fut le signal de notre fuite. Ma main tomba tremblante dans celle du beau Fiorelli. Nous volâmes à mon appartement, où je m’enfermai, bien résolue à ne rejoindre la compagnie, quoi qu’il arrivât, qu’après avoir bien fait à mon aise, avec méditation, ce que je venais de voir faire aux autres dans le désir de la brutalité." (Extrait de Félicia ou mes fredaines).


La reliure porte l'étiquette de Moulière, relieur à Nîmes.


TRÈS BON EXEMPLAIRE DE CETTE TRÈS RARE EDITION ANCIENNE ILLUSTRÉE DU FÉLICIA DE NERCIAT.

VENDU

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