mardi 4 septembre 2018

Edmond Haracourt. La Légende des Sexes du Sire de Chambley. Edition originale imprimée à 212 exemplaires. Celui-ci imprimé sur vergé teinté et dédicacé à Camille Enlart. Très bon exemplaire dans sa première reliure de l'époque.


Le Sire de Chambley (Edmond H....) [Edmond HARAUCOURT]

La Légende des Sexes. Poèmes Hystériques.

Imprimé à Bruxelles pour l'auteur. 1882 (date sur la couverture et le titre). Achevé d'imprimer le 15 avril 1883 (colophon).

1 volume in-8 (23 x 15 cm) de 147-(1) pages.

Reliure demi-chagrin caramel beurre salé à larges coins de l'époque, filets dorés sur les plats, dos à nerfs avec filets dorés, tête dorée, relié sur brochure, non rogné (ébarbé), couverture conservée (les deux plats). Texte imprimé sur papier vergé teinté. Reliure bien conservée malgré quelques usures aux coins et quelques marques au dos, mors légèrement frottés, sans gravité. Deux pages (128/129 sont en grande partie brunies par contact avec un papier acide resté dans le volume pendant un siècle ...).

Édition originale.

Il a été tiré de cet ouvrage 200 exemplaires, en 2 séries et 12 exemplaires sur Japon. Ces volumes, tous numérotés et paraphés par l'auteur, ne pourront être vendus.

Celui-ci, 1 des 200 exemplaires sur vergé teinté appartenant à la deuxième série et numéroté à la plume par l'auteur lui-même "b. 84".

Exemplaire offert par l'auteur à son ami et collègue Camille Enlart (dédicace non datée).


Provenance : Bibliothèque Camille Enlart. Enlart était un archéologue réputé. Originaire de Boulogne-sur-Mer, il a 21 ans au moment de la sortie de ce volume distribué aux seuls amis de l'auteur. Haraucourt en a à peine 27. Les deux hommes sont sans aucun doute amis et très proches.


La Légende des Sexes est le premier ouvrage de l'auteur. Haraucourt a 26 ans lorsqu'il publie de manière confidentielle à 212 exemplaires seulement (il existe plusieurs contrefaçons publiées ensuite) ces poèmes hystériques, véritable "épopée du bas-ventre".


"Donc, dans le coït, rien ; à côté, rien. Avons-nous essayé les premiers la force contractile du sphincter anal ? (...) Avons-nous inventé le travail des langues, et le baiser adultère des taureaux ou des cygnes ? Rien ! nous n'avons rient fait, et nous ne ferons rien ! Il ne nous reste qu'un espoir, qu'un rêve irréalisé encore : l'application de l'envahissante électricité au travail voluptueux de nos sens. Et même doutons-nous, misérables que nous sommes, dans notre espérance dernière : car peut-être l'amour et le désir ne sont-ils que ces phénomènes dynamo-électriques , nos sexes, des accumulateurs ou des piles chargés de voltes et d'ampères, et desquels jaillit, par l'approche d'un pôle contraire, la resplendissante électricité de l'amour. (...)" (extrait de la Préface).



Élaboré en contre pied de la Légende des Siècles du grand Hugo, ce livre eut le succès du soufre. Du coït des atomes en passant par le Sonnet pointu ou le Sonnet honteux, ce volume composé de 39 poèmes est une aventure textuelle au pays des libertés curieuses.



En voici quelques-uns :


Sonnet honteux

L'anus profond de Dieu s'ouvre sur le Néant,
Et, noir, s'épanouit sous la garde d'un ange.
Assis au bord des cieux qui chantent sa louange,
Dieu fait l'homme, excrément de son ventre géant.
Pleins d'espoir, nous roulons vers le sphincter béant
Notre bol primitif de lumière et de fange ;
Et, las de triturer l'indigeste mélange,
Le Créateur pensif nous pousse en maugréant.
Et un autre…




Sonnet pointu


Reviens sur moi ! Je sens ton amour qui se dresse ;
Viens, j'ouvre mon désir au tien, mon jeune amant.
Là... Tiens... Doucement... Va plus doucement...
Je sens, tout au fond, ta chair qui me presse.
Rythme bien ton ardente caresse
Au gré de mon balancements,
O mon âme... Lentement,
Prolongeons l'instant d'ivresse.
Là... Vite !
Plus longtemps !
Je fonds ! Attends,
Oui, je t'adore...
Va ! va ! va !
Encore.
Ha !




La jeune

J'ai rêvé d'une vierge impécable, aux yeux froids,
Qui d'un bond, émergeant des moiteurs de sa couche,
Vient accrocher le poids de son corps à ma bouche
Et pointe sur mon coeur le roc de ses seins droits.
Longtemps, pieuse et chaste, elle a porté la croix
De l'orgueil vertueux que nul désir ne touche ;
Mais voilà que le rut s'est éveillé, farouche,
Et la chair en révolte a réclamé ses droits...
Elle plaque à ma peau la peau d'un ventre ferme,
Et furieusement crispée, elle m'enferme
Dans l'effort ingénu de sa lubricité.
Ses canines d'enfant mordent ma chair de mâle...
A moi, toute ! Et la fleur de sa nubilité,
Pourpre, s'épanouit sous l'onde baptismale.


Très bon exemplaire en reliure de l'époque bien conservée.

Prix : 850 euros


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